Punch Imlach doit choisir un numéro, entre 1 et 20. 20 numéros autour d’une roue. Un tirage déterminera si la nouvelle franchise qu’il dirige obtiendra le premier choix au prochain repêchage ou bien si c’est plutôt l’autre équipe qui fait également son entrée dans la ligue qui aura le privilège de choisir au premier rang.
La L.N.H. tient sa deuxième expansion et la ligue passera à 14 équipes lors de la saison 1970-1971.
Puisque le repêchage se tient à l’hôtel Reine Elizabeth de Montréal le 11 juin 1970, puisque que son numéro favori est le 11, Imlach choisit le #11…
Les Sabres de Buffalo auront donc les numéros 11 à 20 de la roulette, tandis que les Canucks de Vancouver auront les numéros 1 à 10. Clarence Campbell, président de la ligue, tourne la roulette et il annonce son arrêt vis-à-vis le chiffre 1. Il commence à féliciter la délégation qui représente l’équipe des Canucks…
xxxGilbert Perreault naît le 13 novembre 1950, à Victoriaville, ville renommée pour ses bâtons de hockey de bois Vic, au même titre que Sherbrooke avec le Sherwood.
Dès son jeune âge, il joue au hockey dans la rue Campagna de son patelin, mais il n’enfile sa première paire de patin qu’à l’âge de 8 ans. Ses mains sont déjà très habiles. Il a 9 ans seulement lorsqu’il participe au tournoi peewee de Québec une 1ère fois. Ses coéquipiers, tout comme ses adversaires, sont en général plus âgé que lui, mais comme il n’existe aucune catégorie inférieure (en âge s’entend) au peewees… Il développe ainsi ses habiletés et devient un excellent manieur de bâton. Perreault admire Jean Béliveau, qui a par ailleurs grandi et évolué pour Victoriaville durant sa jeunesse.
Il quitte le nid familial à 16 ans pour aller joindre une équipe de junior A de Thetford, les Canadiens. La ligue cessera ces activités à la fin de la saison 1966-1967; Thetford raffle les grands honneurs de cette dernière saison grâce au brio de Perreault et de Marc Tardif, entres autres.
L’année suivante, Perreault joint les rangs du prestigieux club le Canadien junior de Montréal, organisation qui fait alors partie de la ligue de l’Ontario.
La carrière junior de Perreault sera exceptionnelle et le Canadien junior remportera 2 Coupe Memorial consécutives. La dominance de l’équipe dans les séries de 1969 et 1970 amène un changement dans le tournoi de la coupe Memorial, qui fait en sorte que seules les équipes de niveau junior majeur auront maintenant la chance de se qualifier pour remporter la dite Coupe.
À sa dernière saison junior, Perreault reçoit le titre de joueur de plus utile de l’O.H.A. (Ligue junior de l’Ontario), bien que Marcel Dionne le coiffe au fil d’arrivée pour le titre de champion marqueur.
xxxPunch Imlach regarde attentivement la roue et réalise qu’elle s’est arrêtée vis-à-vis le numéro 11, et non le numéro 1… Coup de théâtre, le premier choix au repêchage de 1970 revient au Sabres de Buffalo. Imlach s’empresse de sélectionner Gilbert Perreault, qui devient du même coup LE Sabres original. L’expression « joueur de franchise » prend tout son sens avec cette sélection. Le hasard faisant bien les choses, Perreault, qui a déjà porté le #11 durant sa carrière junior, conserve ce numéro pour faire honneur au numéro de roulette qui a confirmé sa sélection.
C’est la deuxième saison consécutive que le premier choix québécois ne revient plus d’office aux CH (N.B. que le CH s’ajustera l’année suivante et parviendra tout de même à mettre la main sur Guy Lafleur).
xxxDès sa 1ère saison au sein de l’équipe qui lui est pratiquement sienne, Perreault se démarque. Il marque un but dès sa première présence et s’attire les éloges de plusieurs. Bobby Orr, patineur et manieur de bâton réputé s’il en est un, racontait :
Je ne pouvais y croire la première fois que je l’ai vu. Sa tête et ses épaules vont d’un côté, ses jambes d’un autre côté, et la rondelle fait quelque chose de complètement différent. « Bert » enfile 38 buts et totalise 72 points, mettant ainsi la main sur le trophée Calder. Son style de jeu électrisant avec montées de bout en bout de la glace charme les partisans de Buffalo. Perreault devient renommé pour sa propension à déjouer le gardien plutôt qu’à tirer sur lui. Imlach parvient à modifier quelque peu cette habitude et Perreault admettra que c’est par manque de confiance en la puissance de son lancer frappé qu’il a pris l’habitude d’enfiler l’aiguille…
La séance de repêchage suivante voit les Sabres acquérir Richard Martin au 1er tour, ex-coéquipier de Perreault au sein du Canadien junior.
Perreault devient la pierre angulaire des Sabres et de la French Connection, complétée par René Robert. Buffalo participe aux séries dès le printemps de 1973, année où il rafle le Lady Bing. L’équipe rate le rendez-vous de 1974, Perreault manquant plus de 20 matchs en raison d’une fracture à la jambe, mais est l’équipe Cendrillon du printemps de 1975 et atteint la finale pour y affronter les Flyers de Bobby Clarke et Bernie Parent. Cette série finale sera la scène d’un des matchs les plus mémorables de l’histoire du hockey…
Le match 3 de cette série est nommé « the Fog Game ». La température extérieure et par conséquent intérieure de l’aréna inhabituellement élevée, combinée au manque d’air climatisé et aux nombreux fans présents firent en sorte qu’un épais brouillard couvrit la glace et empêcha même les spectateurs de voir ce qui s’y déroulait. Durant le match, un coéquipier de Perreault, le centre Jim Lorentz, aperçut une chauve-souris au travers du brouillard et la tua en l’affligeant d’un coup de son bâton. En prolongation, Perreault dirigea une passe vers Robert qui marqua d’un angle impossible.
Les Sabres perdent cette série en 6 matchs, les partisans en imputent la faute à la malédiction de la chauve-souris et Perreault ne s’approche plus jamais aussi près de la Coupe Stanley durant sa carrière de dix-sept saisons.
xxxAu niveau international, Perreault est un fier représentant du Canada et performe très bien durant ces rendez-vous. Il inscrit 2 points en 2 matchs participés durant la série du siècle et fait très bien (8 points en 7 matchs) aux côtés de Dionne et Lafleur durant la première Coupe Canada de 1976, remportée par le Canada. Lors de la Coupe Canada de 1981, il complète un trio à faire peur aux côtés de Lafleur et Gretzky, amassant 9 points en 4 parties, avant de se fracturer à nouveau la jambe. Il est sélectionné au sein de l’équipe toute étoile du tournoi malgré qu’il n’ait participé qu’à quatre des sept matchs du Canada.
xxxJoueur capable de répondre sous la pression, Perreault, bien que ralenti par les blessures, marque tout de même plus de 30 buts par saison entre 1981 et 1985. Il est le 16e joueur à atteindre le plateau des 1 000 points, ce qu’il fait le 3 avril 1982. Il marque son 500e but le 9 mars 1986. La passion et le désir de se surpasser n’y étant plus, il décide de se retirer au printemps de 1987. Une nouvelle vedette au style s’apparentant au sien vient d’ailleurs de faire son entrée dans la ligue…
Une technicalité relative aux fonds de pension des joueurs le force à revenir jouer 20 matchs en 1987-1988. Il marque 9 buts et totalise 16 points en 20 matchs pour lesquels il n’a aucun intérêt. Il prend définitivement sa retraite, en tête des marqueurs de l’équipe.
Perreault termine sa carrière avec 512 buts, 814 passes, pour 1 326 points en 1 191 matchs. 103 points en 90 parties éliminatoires.
Capitaine de l’équipe de Buffalo de 1981 jusqu’à sa retraite, Perreault y jouit toujours aujourd’hui d’une popularité et d’une reconnaissance que l’on peine ici à mesurer.
xxxGilbert Perreault n’avait pas soif d’attention médiatique durant sa carrière; il apprécie toutefois aujourd’hui les honneurs comme le retrait de son chandail par l’équipe pour laquelle il a évolué durant l’ensemble de sa carrière professionnelle et son intronisation au temple de la renommée.
La ville de Victoriaville, que Perreault habite toujours, a bâti en 1981 un aréna l’honorant. Il passe du temps en famille, joue au golf et s’adonne à d’autres loisirs, en plus d’être ambassadeur pour le hockey et la franchise pour laquelle il a joué avec la régularité d’un métronome durant 17 saisons.
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